Il était prévu que soient ensuite réalisés les travaux de l'Agence du Numérique en Santé, définissant les normes techniques de réalisation du télésoin, avant que celui-ci soit intégré légalement à nos pratiques professionnelles.
Mais, entre temps, conséquence de la pandémie, le télésoin a été autorisé temporairement et en urgence dès mars 2020, en l'absence d'un avis définitif de la HAS et d'un cadre technique précis.
Pendant plusieurs mois, les professionnels de santé ont donc expérimenté ces nouvelles pratiques avec un contour minimal, permettant notamment l'usage d'outils peu sécurisés (exemple : Zoom).
Le cadre est aujourd'hui enfin en passe d'être clarifié.
Parution de l'avis de la Haute autorité de santé
Mi-mars 2021, l'avis de la HAS concernant les critères d’éligibilité au télésoin et les bonnes pratiques pour sa mise en œuvre a été mis en ligne.
Vous retrouverez cet avis sur son site, avec plusieurs documents :
- une fiche "critère d’éligibilité et bonnes pratiques" à destination des professionnels de santé
- le rapport d'élaboration reprenant les travaux de réflexion auxquels nous avons participé
- une fiche d'information pour les patients : "Consulter et se faire soigner à distance - Téléconsultation et télésoin"
Construction d'un référentiel fonctionnel avec l'Agence du Numérique en Santé
En novembre 2020, L'ANS nous a conviés à participer aux travaux de co-construction du référentiel fonctionnel des logiciels de télésoin.
ORA a pris part aux différentes étapes du processus et été présente aux différentes réunions de réflexion et de concertation.
- Les 25 et 26 novembre 2020 a eu lieu la réunion de lancement de ces travaux, au cours de laquelle l'ANS a présenté aux 9 professions déjà autorisées à exercer en télésoin les enjeux et les objectifs de ce référentiel fonctionnel et les moyens envisagés pour sa construction. Le référentiel fonctionnel déjà élaboré pour les logiciels de télémédecine nous a été présenté comme base de réflexion, la suite des travaux devant définir les attentes et besoins techniques spécifiques de chaque secteur quant au télésoin.
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Le 21 janvier 2021, nous avons participé à un groupe de travail spécifique à l'orthophonie. Il s'agissait d'échanger sur nos usages du télésoin et de définir des exigences fonctionnelles clés pour notre profession.
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En avril 2021, nous avons reçu une première mouture du référentiel, auquel il nous a été demandé d'apporter les corrections/précisions qui nous paraissaient nécessaires
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Une nouvelle réunion interprofessionnelle a eu lieu le 1er juin 2021, afin de nous présenter la dernière version des travaux.
Avant de participer aux concertations, nous sommes allés voir comment se passe le télésoin dans les pays qui l'ont déjà généralisé, notamment le Canada et les USA ; cela nous a permis de nourrir notre réflexion sur les points techniques et éthiques qui nous semblaient importants.
Lors des concertations, nous avons donc focalisé notre attention sur plusieurs points :
- La nécessité d'un système garantissant la protection des données personnelles et de santé des patients (respect du RGPD et système obligatoirement agréé HDS) et la sécurité des échanges vidéo et de documents (cryptage de bout en bout) ; il nous semble souhaitable que soit adossé à la vidéotransmission un système de messagerie sécurisée de santé facilement accessible au patient, afin qu'il puisse à la fois y déposer des documents à destination de l'orthophoniste, et en recevoir.
- L'interopérabilité avec nos logiciels-métiers, qui coordonnerait la transmissions des factures des actes de télésoin aux caisses et le paiement desdits soins. Pour les praticiens le souhaitant, la plupart des plateformes proposeront certainement en plus du télésoin, des agendas en ligne et des solutions monétiques intégrées (voyez d'ailleurs le nombre de prestataires qui se positionnent actuellement sur le secteur de la gestion de cabinet !).
- La possibilité de réaliser des vidéotransmissions à plusieurs praticiens, notamment pour des consultations de praticiens-spécialistes en accompagnement du patient. Attention, les séances de groupe en télésoin sont proscrites, puisque la définition du télésoin est « [la mise] en rapport [d']un patient et un ou plusieurs pharmaciens ou auxiliaires médicaux dans l'exercice de leurs compétences prévues au présent code » (l'incohérence avec l'existence d'actes de groupe dans notre NGAP a été soulevée mais n'a pour l'heure pas obtenu de réponse).
- Le surcroît de travail et l'incompatibilité avec notre nomenclature de l'obligation d'abonder le DMP (ou le dossier papier) du patient d'un compte-rendu d'activité à chaque séance.
- L'intégration de fonctionnalités propres à notre profession, telles que le tableau blanc ou le partage d'écran et la prise en main à distance de la souris par le patient, ce qui facilite l'utilisation des logiciels de rééducation.
L'importance d'une authentification forte à la fois du praticien et du patient nous a semblé plus anecdotique nous concernant, puisque nos actes en télésoin sont soumis à une rencontre préalable en présentiel du patient pour le bilan initial, et la réalisation des actes obligatoirement par vidéotransmission.
De même, nous sommes peu concernés par le remplacement ponctuel du praticien ; nous resterons toutefois attentifs à ne pas recevoir de pénalité en cas de non-remplacement pendant nos congés. Visiblement, le législateur ignore la difficulté des orthophonistes à trouver des remplaçants pour de courtes durées !
Le référentiel en concertation publique
Depuis le 9 juin et jusqu'au 9 juillet, le référentiel ainsi élaboré est mis en concertation publique.
Vous pouvez participer à cette concertation ici : https://participez.esante.gouv.fr/consultation/referentiel-fonctionnel-des-logiciels-de-telesoin/presentation/presentation
À l'issue de cette dernière phase, le référentiel fonctionnel sera validé et fera l'objet d'une publication par l'ANS.
À partir de cette publication, les prestataires de services du télésoin devront respecter ce cahier des charges et les professionnels seront tenus d'utiliser des solutions techniques respectant les exigences de l'ANS.
Les orthophonistes devront ainsi souscrire aux offres de ces prestataires qui, n'en doutons pas, ajusteront parfaitement leurs tarifs aux subventions d'équipement (voir Avenant 17 à la Convention nationale, qui alloue 350 euros pour l'équipement de vidéotransmission et 175 euros pour l'équipement en appareils médicaux connectés).
Si notre ministère de tutelle semble avoir choisi pour l'instant de faire subventionner indirectement ces équipements par l'Assurance Maladie, nous ne savons pas s'il réfléchit à développer sa propre solution gratuite et accessible à tous, comme il l'a fait avec la messagerie sécurisée de santé.
Certaines régions y ont travaillé, notamment en Auvergne Rhône Alpes, ajoutant un outil de téléconsultation aux services de e-santé déjà offerts aux professionnels de santé et patients par l'intermédiaire de MonSisra, cependant celui-ci n'intègre pas encore toutes les fonctionnalités nécessaires à la pratique de l'orthophonie, telles que déterminées avec l'ANS.